speaks in poem, lives in clouds // budxfanta

Parfois sans même qu'il ne sache pourquoi, c'est le soleil qui l'attriste. Lorsqu'il se lève, il s'attend à voir les nuages chargés de pluie, pour accompagner son humeur, et ce sont des rayons de soleil qui pleuvent sur son museau. C'est une colère injuste qui grandit en lui, envers une nature bien ignorante de sa tourmente. Elle continue de prospérer, silence, qu'importe les tempêtes. Il sait que même après les incendies, elle parvient à renaître. Il se sent alors minuscule, ridicule. Depuis que Coeur de Primevère est partie, Bud peine à puiser cette force qui lui manque. Il la cherche, partout, ailleurs surtout.
Il apprécie de pouvoir aller se dégourdir dans la lande et chasser ses idées noires quand il lui plaît c'est la liberté d'un chasseur. Bud s'élance à une telle vitesse qu'il peut entendre le propre battement de son corps par dessus le vent, le paysage défile et avec lui ses pensées, jusqu'à ce qu'elles se perdent tout comme ses pattes. Le petrichor se mêle au aux odeurs de crotte de lapins qui lui indiquent la présence d'une famille non loin. La truffe collée dans l'herbe, il ferme les yeux et suit le parfum appétissant de la viande fraîche. Ses pas le guident jusqu'au abord du chemin du Tonnerre, vers une parcelle d'asphalte moins large et plus sinueuse. Il n'avait jamais remarqué. Pourtant, bud connaît son territoire mieux qu'il se connait lui-même ; facile. L'orientation est sans nul doute son unique qualité, celle qu'on ne peut lui reprocher. Ces yeux si doux et moqueurs sont aussi observateurs et sous ses airs de malandrin, naïf et un peu bête, Bud cache quelques atouts.  La trace continue après le ruban noir qui lui brûle le coussinet quand il pose une pâte dessus. Ici, le soleil à eu le temps de réchauffer suffisamment sol. Mince. Bud n'est pas farouche, mais il connaît les regards qui l'attendent si ce soir il rentre bredouille. D'un autre côté, risque sa vie face aux monstres et le clan ennemi ne vaut pas un lapin. Ni une famille complète. Il étudie la situation un moment avant de s'élancer penaud le long de la frontière. Advienne que pourra, Bud sait que de toute façon, il ne sera pas regretté comme sa soeur l'a été. Comme pour venir confirmer ses pensées funestes, le craquement d'une brindille le fait sursauter. Bud laisse échapper un petit cri de surprise et se roule sur le côté pour éviter... Eviter quoi d'ailleurs ?  Aussitôt le chasseur se redresse sur ses quatre pâtes et bégaye Je ... je  peux tout expliquer ! Ah ça, il peut expliquer. Il peut toujours essayer.

Bud ne s'attendait pas à ça. Il est rare que les scénarios qui jouent dans sa tête se réalisent. Il vit son rêve réveillé, il ne limite pas ses fantasmes à l'ombre de la nuit. Non, Bouton d'Or a décidé qu'il vivrait d'amour et d'eau fraîche, presque littéralement. Il va le monde comme une feuille portée la bise légère et chante à qui veut bien l'entendre les plaisirs de la vie, l'importance du code du guerrier, les exploits guerriers de son clan... tout en ignorant quelques règles, surtout celles qui précisent qu'il est très malvenu d'aller fricoter avec l'ennemi. Le respect on s'en manque bien, ce que les gens veulent ce sont des belles morales et de beaux yeux, il n'y a que le beau qui compte. Bouton d'Or ne cherche pas à être respecté, il veut être admiré. Le Clan de l'Ombre n'est pas celui qu'il doit craindre le plus, il a entendu dire que son meneur est un lâche qui ne sait pas gérer ses guerriers, ou l'inverse. Quelque chose comme ça. Si ce chat n'en fait pas parti, qu'est-il donc ? Un de ces fameux solitaires ? Des héros déchus, chassés de leur clan, des parias qui boivent le sang de leurs proies et se nourrissent de chatons ? Monstres sans coeur qu'il faut chasser à tout prix, porteurs de maladies mortelles. Il n'est pas ignoble, il voyait ces êtres plus grands, plus gros, au pelage dru et tâché de sang. Celui là semble un peu négligé et fatigué. Il n'a pas la prestance d'un chat d'un clan ; il n'est pas moche non plus.  Le chat albinos lui rappelle quelque chose, on en croise pas partout des comme lui, on dirait un fantôme avec ses yeux tristes. Ses yeux bleus comme la rivière. « Hm. Tu peux me demander beaucoup de choses bel inconnu, mais ne me parle pas d'honneur ahaha, surtout pour un intrus. Tu ne dois pas savoir qui je suis. » Comment pourrait-il le savoir ? Ce n'est pas le problème de Bouton d'Or qui a bombé le torse et oublié toute politesse et toute raison. Il aurait l'air fier si une patrouille devait surgir, mais son odorat le trompe rarement. Ce chat doit souvent venir ici pour qu'il le confonde. C'est une bonne chose pour l'étranger, ces idiots de l'Ombre ne doivent même pas faire la différence entre un de leurs camarades et un exilé. « Je me nomme Bouton d'Or, chasseur du Clan du Vent et trésor de ces bois. Et toi ? » Bouton d'Or le contourne, le dévisageant sans se cacher. « Alors comme ça, c'est pas chez toi ? T'as pas peur de te faire capturer par ces barbes ? Ou pire... brr. » Il y a un rire dans sa voix, quelque chose d'enfantin. Car aucune de ces possibilités n'existe, au pire il se fera juste botter l'arrière train. Rien de bien méchant, Bouton d'Or suppose qu'on ne tue plus vraiment aujourd'hui.
Et pourtant, on lui a prit ce qu'il avait de plus cher au monde. Sa tendre soeur.